L'effondrement des bourses au mois d'août tend à attester l'hypothèse d'une crise profonde du crédit qui ne peut se résumer aux seuls montants des crédits à risques - "subprime" - émis aux Etats-Unis. En effet, les quelques 150 milliards $ qui correspondaient à ces fameux "subprime" sont depuis longtemps effacés. La hausse des taux inter-bancaires et les injections massives de liquidités des banques centrales montrent plutôt une crise de confiance des investisseurs à l'égard de la rentabilité du crédit en général. Si la crise est issue des Etats-Unis, elle touche désormais l'ensemble du système financier international.
Le système capitaliste repose sur une dette continuellement reportée, qui dans son principe est destinée à être perpétuelle (
J. A. Schumpeter). Ce faisant, les montants prêtés ne correspondent que partiellement à une contre-partie réelle, mais à une contre-partie telle qu'elle pourrait se concrétiser dans l'avenir. L'investissement capitaliste repose donc fondamentalement sur un pari de croissance indéfinie de l'économie, sans lequel tout investissement, selon les modèles de la micro-économie, serait vain. Dans ce contexte les crises boursières sont donc des périodes d'ajustement entre la rentabilité escomptée et les biens réellement produits.
Toutefois, la crise actuelle se distingue de ce modèle en tant qu'elle est d'abord une crise du système financier et non de l'économie réelle. En effet, la croissance mondiale autour de 5% n'a jamais été aussi forte et, sauf aux Etats-Unis du moins, n'avait aucune raison de ralentir. C'est le sytème de crédit qui, ces denières années, s'est emballé en prêttant tout azimut sans être en mesure de garder une visibilé suffisante sur les investissements consentis. Ainsi une banque, malgré une politique d'investissement très prudente, peut néanmoins par le jeu des prêts en cascade se retrouver exposée Ó des créances douteuses comme le "subprime" américain.
La crise actuelle exprime donc une chute brutale de confiance des acteurs financiers les uns vis-à-vis des autres et un souci d'augmenter la visibilité de leurs investissments. Tant que la monnaie, à commencer par le dollar et le yen, était bon marché, cette question de visibilité pouvait passer au second plan; les acteurs financiers étant en mesure de se refinancer à moindre coût auprès des banques centrales. Mais la politique de resserrement monétaire entamée ces derniers temps par la FED a dévalué les investissements et conduit les créanciers à un regain soudain de prudence.
En baissant leurs taux d'intérêt, à l'image de la FED le 17 août dernier, les banques centrales pourront peut-être stopper la crise en refinançant et en réévaluant le marché de la dette. Mais elles ne résoudront pas le problème de fond. L'absence de visibilité sur les investissments demeurera et forcera un loyer de la monnaie de moins en moins cher. Si ce type de mécanisme parvient à se péréniser, les banques centrales auront définitivement perdu leur rôle de régulateur de l'économie et deviendront de simples réserves de valeurs au service du système financier international.
Ce changement de capitaine à la tête du navire n'est peut-être pas une mauvaise chose, mais les besoins de financement du marché de la dette étant supérieur à celui de l'économie réelle, l'équilibrage risque de s'effectuer par une inflation mondiale sans précédent.
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